Les entreprises et les salariés face au risque de pandémie

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Les entreprises et les salariés face au risque de pandémie due aurisque covid19 droit du travail COVID-19 (Coronavirus) :  Premiers enseignements juridiques et sociaux

 

Face à un risque de pandémie virale résultant de l’expansion du virus COVID-19 (CoronaVirus) le Ministère de la Santé multiplie les conférences et les allocutions pour présenter tout un ensemble de mesures préventives visant à limiter la propagation du virus.

Le Ministère du Travail, quant à lui, n’est pas en reste sur le sujet et a pris une circulaire en date du 28 février 2020 cosigné avec le ministère de la santé intitulé : Questions/réponses pour les entreprises et les salariés, incitant les entreprises à anticiper ce qui pourrait être un absentéisme record qui affecterait la santé des salariés et la marche générale des entreprises.

Nous pouvons d’ores et déjà noter que les pouvoirs publics ont choisi de s’adresser tout autant aux entreprises et à leurs dirigeants qu’aux salariés des entreprises.

Devant la complexité juridique de la situation et son caractère inédit sur le plan social et sanitaire, il apparaît donc légitime de s’interroger sur la portée du texte et ses conséquences pratiques sur l’emploi des salariés.

Le présent article a donc pour but de répondre principalement aux questions suivantes :

  1. Quelles sont les mesures préconisées par l’Administration du travail dans le cadre de l’extension du coronavirus ?
  2. Face à des mesures pouvant affecter l’organisation du travail et les contrats de travail, quid des droits individuels des salariés ?
  3. Quel rôle à jouer pour les institutions représentatives du personnel ?
  4. Quelle est la valeur juridique de la circulaire du 28 février 2020 ?
  5. En cas de survenance du risque sanitaire, le salarié peut-il exercer son droit de retrait ?

 

1. Face au risque de pandémie due au covid-19 (coronavirus) : présentation et analyse des questions / réponses ministérielles sur la réglementation du travail applicable aux salariés et aux entreprises

 

Quarantaine indemnisée par la Sécu, mesures sanitaires préventives, voyages professionnels annulés… La propagation du nouveau coronavirus (COVID-19) entraîne la mise en place de dispositions particulières dans les entreprises : quels sont les droits des salariés et les obligations des employeurs ?

  •  Si le salarié ou l’un de ses proches revient d’un pays à risque

 Si le salarié revient d’un voyage en Chine, dans les régions de Lombardie et de Vénétie en Italie, de Corée du Sud, d’Iran et de Singapour il lui est recommandé d’informer son employeur avant la reprise du travail.

Cette information n’est pas nécessaire lorsque c’est l’un de ses proches qui revient d’une zone à risque et qu’il a suivi les recommandations sanitaires.

Parallèlement, le ministère du travail fait une double recommandation sanitaire aux entreprises en Française :

  • les entreprises doivent éviter les déplacements professionnels dans les zones à risques ;
  • les entreprises doivent également appliquer les mesures recommandées pour aménager les postes de travail en cas de retour d’un salarié de zone à risque ou de contact avec une personne infectée.

 

Il est rappelé que l’employeur est responsable de la santé et de la sécurité des salariés de son entreprise conformément aux dispositions de l’article L 4121-1 du Code du travail.

L’employeur peut demander au salarié de ne pas se présenter sur son lieu de travail. Dans ce cas, sa rémunération est maintenue et sa période d’absence assimilée à une période normalement travaillée ouvrant le bénéfice aux mêmes droits que les salariés présents dans l’entreprise.

Ainsi, dans un contexte évolutif et à titre de précaution, le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères déconseille les voyages en Chine sauf raison impérative et recommande de se tenir éloigné momentanément du pays et de différer les déplacements.

Il est également conseillé de reporter tous les déplacements non essentiels dans les régions de Lombardie et de Vénétie en Italie, en Corée du Sud, en Iran et à Singapour.

Ces zones sont susceptibles d’évoluer et sont régulièrement mises à jour sur le site https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus.

Ce que doit faire le salarié pendant les 14 jours suivant son retour

 Prévenir son employeur

  1. Surveiller sa température 2 fois par jour
  2. Surveiller l’apparition de symptômes d’infection respiratoire (fièvre, toux, difficultés respiratoires)
  3. Respecter les mesures habituelles d’hygiène, notamment se laver fréquemment les mains avec du savon ou les désinfecter avec une solution hydro-alcoolique
  4. Éviter les contacts proches (réunions, etc.)
  5. Éviter tout contact avec les personnes fragiles (femmes enceintes, personnes âgées, etc.)
  6. Éviter toute sortie non indispensable (cinéma, restaurants, etc.)
  7. En cas de signes d’infection respiratoire dans les 14 jours suivant mon retour : contacter le 15.

 

Il convient de suivre les recommandations sanitaires dans les 14 jours suivant le retour.

2. La mise en œuvre le télétravail

 

Le télétravail est un droit prévu par l’article L 1222-9 du Code du travail issu de l’ordonnance du 22 septembre 2017. Le salarié peut demander à son employeur à bénéficier du télétravail de manière ponctuelle ou durable par tous moyens. Si l’employeur donne son accord, cela peut se faire par tout moyen. Le refus de l’employeur doit être motivé.

Le télétravail peut être mis en œuvre lorsque l’aménagement du poste de travail est rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et pour garantir la protection des salariés.

Il est rappelé que l’article L 1222-11 du Code du travail mentionne le risque épidémique comme pouvant justifier le recours au télétravail sans l’accord du salarié.

Il est précisé à l’article L 1222-11 du Code du travail qui stipule qu’en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, la mise en oeuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés.

La mise en œuvre du télétravail dans ce cadre ne nécessite aucun formalisme particulier.

Cette décision unilatérale ne peut pas être contestée par le salarié. Ce n’est pas une modification du contrat de travail, mais un simple aménagement du poste de travail.

Ainsi, de nombreuses entreprises ont demandé aux salariés de retour (à titre personnel ou professionnel) de zones reconnues à risques, de respecter une période de 14 jours à leur domicile – en télétravail dès que c’est possible – afin de s’assurer qu’aucun symptôme n’apparaît au cours de cette période.

C’est par exemple le cas d’Orange, de Sanofi, de PSA, de BNP Paribas et de l’agence de communication Lewis Paris. Il s’agit ainsi d’inciter les personnes potentiellement porteuses du virus à rester chez elles, pour empêcher la propagation de la maladie dans l’entreprise.

Si l’employeur ne peut adapter le poste du salarié en vue de limiter les contacts et si le télétravail n’est pas compatible avec son activité, il peut tout de même demander au salarié de rester à son domicile.

Dans ce cas, comme l’indique le ministère du Travail : même si le salarié ne bénéficie pas d’un arrêt de travail délivré par un médecin de l’ARS, sa rémunération est maintenue et sa période d’absence est assimilée à une période normalement travaillée ouvrant le bénéfice aux mêmes droits que les salariés présents dans l’entreprise.

En revanche, si un salarié s’affranchit des recommandations de confinement, il pourrait être sanctionné par son employeur pour faute professionnelle. En effet, selon l’article L 4122-1 du code du travail, il incombe à chaque travailleur de prendre soin […] de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail.

 

3. Les mesures que l’employeur peut imposer au salarié revenant d’un pays à risque

 

Dans le cadre de son obligation de santé et de sécurité vis-à-vis des salariés, l’employeur peut demander au salarié de télétravailler ou aménager son poste de travail de manière à limiter le risque de contagion.

Cependant, l’employeur peut néanmoins, unilatéralement, si la situation le requiert :

  • placer le salarié en télétravail ;
  • modifier les dates de congés déjà posés ;

L’employeur peut déplacer des congés déjà posés par le salarié sur une autre période à venir pour couvrir la période de 14 jours, compte tenu des circonstances exceptionnelles en application de l’article L 3141-16 du Code du travail. Par contre si le salarié n’a pas posé de congés, l’employeur ne peut les imposer.

Si aucune solution ne peut être retenue, le salarié peut prendre contact avec l’agence régionale de santé (via le portail web www.ars.sante.fr), afin qu’un médecin habilité par celle-ci procède le cas échéant à l’établissement d’un avis d’arrêt de travail correspondant à la durée d’isolement préconisée.

Si l’employeur invite le salarié à ne pas se présenter sur son lieu de travail et à défaut de cet avis d’arrêt de travail, la rémunération ne peut être suspendue et sa période d’absence est assimilée à une période normalement travaillée ouvrant le bénéfice aux mêmes droits que les salariés présents dans l’entreprise.

L’employeur peut également prendre d’autres mesures générales comme la diffusion de consignes sanitaires à l’ensemble du personnel.

4. L’enfant d’un salarié fait l’objet d’une demande de respect d’une période d’isolement

 

Pour avoir été en contact avec une personne malade du coronavirus ou avoir séjourné dans une zone où circule le virus (Covid-19), les assurés peuvent faire l’objet d’une mesure d’isolement, d’éviction ou de maintien à domicile.

Ils se trouvent alors dans l’impossibilité de travailler, même s’ils ne sont pas malades eux-mêmes.

Un décret paru au Journal officiel du 1er février 2020 (Décret n° 2020-73 du 31 janvier 2020 portant adoption de conditions adaptées pour le bénéfice des prestations en espèces pour les personnes exposées au coronavirus) leur permet de bénéficier d’indemnités journalières pour une durée maximale de 20 jours.

 Le décret prévoit également que l’Assurance maladie n’applique pas de délai de carence, afin de permettre le versement des indemnités journalières dès le premier jour de l’arrêt.

De plus, quand on a un enfant malade, on bénéficie exactement du même droit. Un salarié peut donc tout à fait bénéficier de 20 jours de prise en charge de salaire par la caisse d’assurance maladie.

Ainsi, si le salarié ne dispose pas d’une autre solution de garde, il peut prendre contact avec l’agence régionale de santé (via le portail web www.ars.sante.fr ou la plateforme téléphonique nationale), afin qu’un médecin habilité par celle-ci procède à l’établissement d’un avis d’arrêt de travail correspondant à la durée d’isolement préconisée de l’enfant.

Afin de limiter la propagation de l’épidémie, ces conditions dérogatoires sont mises en œuvre

pendant 2 mois à compter du 2 février 2020.

 

5. Qu’en est-il du rôle initialement dévolu au CSE et aux Commissions SSCT en matière de prévention des risques sanitaires ?

 

Rappelons que le CSE est notamment consulté avant toute décision d’aménagement important

modifiant les conditions d’hygiène et de sécurité ou les conditions de santé et, en particulier :

  • avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l’outillage, d’un changement de produit ou de l’organisation du travail;
  • avant toute modification des cadences et des normes de productivité, lier ou non à la rémunération du travail ;
  • sur le plan d’adaptation lors de la mise en œuvre de mutations technologiques importantes et rapides ;
  • sur les mesures prises en vue de faciliter la mise, la remise ou le maintien au travail des

accidentés du travail…

La combinaison de ces dispositions légales prévoit l’association des instances représentatives du personnel, à toute mise en œuvre de mesures d’information et de prévention quant au risque de pandémie virale.

Quant l’appréciation de la légalité d’informations « directes » justifier par l’urgence sanitaire de la situation qui amènerait les entreprises, à ne pas passer par la case CSE, la légalité de la décision s’appréciera à notre sens à la lueur de deux critères alternatifs :

  • L’urgence de la situation (ce qui reste à démontrer à ce jour pour toute les entreprises) nécessitant une information directe et immédiate des salariés ;
  • Le constat que potentiellement et selon chaque situation forcement singulière il ne s’agit pas dans nombre de cas d’un plan d’urgence, mais de simples mesures préparatoires ou conservatoires préalables à la mise en place d’une véritable et vérifiable adaptation de l’organisation du travail aux contraintes ouvertes par l’épidémie.

 

Il faudra donc apprécier en l’espèce, au cas par cas, la nature et l’étendue des mesures mises en place sans consultation préalable pour considérer si ces informations directes seront licites ou non.

Ainsi, l’employeur doit consulter le comité social et économique (CSE) en cas de modification importante de l’organisation du travail (article L 2312-8 du code du travail). Le recours à la visioconférence est encouragé si nécessaire pour éviter les contacts physiques et si l’urgence l’exige, l’employeur peut prendre des mesures conservatoires avant d’avoir effectué la consultation.

Le document unique d’évaluation des risques devra également être modifié dans des délais raisonnables.

 

6. Les droits du salarié au titre de ces arrêts de travail

 

En application du décret n° 2020-73 du 31 janvier 2020, le salarié bénéficie du droit à indemnisation des arrêts de travail qui se caractérise par :

  • Un arrêt de travail sans jour de carence
  • Et une prise en charge au titre des indemnités journalières de sécurité sociale.

S’agissant de l’indemnité complémentaire conventionnelle ou légale, elle s’applique. Un décret viendra très prochainement lever le délai de carence pour l’indemnité légale.

La mise en isolement pendant 14 jours prescrite par le médecin de l’Agence régionale de santé signifie pour les salariés concernés la suspension de leur contrat de travail pendant cette période.

Leurs droits à indemnisation sont identiques à ceux prévus en cas d’arrêt de travail, sans application du délai de carence.

 

7. L’exercice du droit de retrait du salarié

 

Il est nécessaire de rappeler au préalable que pour pouvoir se retirer légalement d’une situation de travail, le salarié doit avoir un motif raisonnable de penser qu’il encourt un danger grave et imminent pour sa santé. Cette appréciation subjective est le fondement de l’exercice du droit de retrait, indépendamment de l’existence réelle d’une situation de danger grave et imminent.

Le bien-fondé de l’appréciation du « motif raisonnable de penser » relève de l’appréciation souveraine des juges du fond et non de l’employeur (Cass. Soc., 11 décembre 1986 : n° 84 42.209, Sté Precilec c/ Nette : Bull. civ. N° 597).

Pour autant, la circulaire est silencieuse sur le fait de déterminer si l’existence d’une pandémie virale ne suffit en soi à justifier l’exercice du droit de retrait, notamment dans la mesure où un employeur mettrait en œuvre tous les moyens nécessaires à la prévention et à la protection du personnel.

Parallèlement, il faut noter que l’employeur ne pourrait contraindre un salarié à rester chez lui en cas de simple doute sur son état de santé, à moins de lui octroyer un congé exceptionnel rémunéré.

Ainsi, le droit de retrait peut être envisagé a minima dans deux situations :

  • l’employeur demande au salarié de se déplacer vers une zone à risque ;
  • un collègue du salarié revient d’une zone à risque ou a été en contact avec une personne contaminée.

 

8. L’employeur demande au salarié de se déplacer vers une zone à risque

 

En vertu des articles L 4131-1 et suivants du code du travail, un travailleur ne peut se retirer d’une situation de travail que s’il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

Rappelons que dans un contexte évolutif et à titre de précaution, le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères déconseille les voyages en Chine sauf raison impérative et recommande de se tenir éloigné momentanément du pays et de différer les déplacements. Il conseille également de reporter tous les déplacements non essentiels dans les régions de Lombardie et de Vénétie en Italie, en Corée du Sud, en Iran et à Singapour.

De plus, ces zones sont susceptibles d’évoluer et sont régulièrement mises à jour sur le site https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus.

Si ces recommandations ne sont pas suivies, et sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, le salarié peut exercer son droit de retrait.

 

9. Quelle est finalement la portée de la circulaire du 28 février 2020 ?

 

En tout état de cause, il faut noter qu’une circulaire n’a pas de valeur juridique impérative, et n’est encore moins d’application directe.

La circulaire constitue donc avant tout un point de vue interprétatif de l’Administration du travail.

À ce titre l’ensemble des règles habituelles du Code du travail et les accords collectifs en vigueur :

  • continuent à s’appliquer, et peu importe que l’entreprise ou l’établissement ne dispose pas d’accords antérieurs relatifs à l’organisation ou à la durée du travail.
  • ne modifient pas le contrat de travail des salariés sans accord exprès de ces derniers ;
  • que les accords collectifs continuent à être respectés, sauf avenant modifiant certaines stipulations pour tenir compte de la période,
  • que les modifications conventionnelles ou contractuelles soient proposées pendant une période limitée dans le temps,
  • que la nouvelle organisation soit justifiée exclusivement par la situation sanitaire et non dans le seul intérêt direct de l’entreprise.

 

La circulaire du 28 février n’institue donc pas de règles de droit nouvelles dérogeant aux dispositions du Code du travail ou aux accords collectifs existants, mais elle présente des préconisations et des recommandations à destination des entreprises.

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